Le 24 juillet dernier, l’Union africaine (UA) a dévoilé sa stratégie continentale en matière d’intelligence artificielle. Cette initiative vise à renforcer la formation, à garantir l’accès aux données pour les supercalculateurs et à protéger les données stratégiques et personnelles. Mais comment l’Afrique peut-elle réellement acquérir une souveraineté sur ses technologies et ses données ?
Former des talents pour l’IA
La souveraineté numérique commence par le développement des compétences. Hichem Turki, directeur d’un technopark à Sousse, en Tunisie, souligne l’importance de cette démarche. Cette année, 500 étudiants sont formés aux technologies de Nvidia, avec un objectif de 2 000 pour l’année suivante. « Nous préparons des talents pour que l’Afrique soit créatrice d’intelligence artificielle, et non seulement consommatrice », affirme-t-il. Il insiste également sur la nécessité de développer des data centers afin de garantir la souveraineté des informations nationales.
Un besoin urgent de data centers
Actuellement, l’Afrique ne compte que 80 data centers sur les 5 000 existants dans le monde. Certains pays, comme la Côte d’Ivoire, visent à accroître ce nombre. Cependant, Luc Missidimbazi, président de la plateforme Osiane, met en garde : « Tant que les problèmes d’énergie ne seront pas résolus, les coûts resteront prohibitifs », rendant inévitable le stockage de données à l’étranger. Il souligne que des coûts jusqu’à quarante fois plus élevés qu’en Europe obligent les pays africains à externaliser leurs données.
Sécuriser les données africaines
L’ingénieur et conseiller du Premier ministre du Congo-Brazzaville insiste sur la nécessité de sécuriser les données africaines où qu’elles soient stockées. L’accès à ces données est crucial et nécessite une authentification solide via des technologies avancées. « Beaucoup de pays africains n’ont pas encore mis en place ces systèmes », observe-t-il.
La protection des données personnelles : un défi majeur
Meshia Cédric Oveneke, co-fondateur d’une entreprise de reconnaissance faciale au Kenya, souligne que la protection des données est au cœur de leurs préoccupations. Son entreprise ne sauvegarde aucune photo et évite les technologies cloud en raison des infrastructures insuffisantes. Cependant, il s’interroge sur le respect général de ces pratiques dans le secteur.
Des législations encore inapplicables
Bien que plusieurs États africains aient adopté des lois pour protéger les données personnelles, leur application reste insuffisante. Les experts pointent un manque de formation adéquate dans les administrations publiques pour mettre en œuvre ces législations.
Un chemin semé d’embûches
L’Afrique se trouve à un tournant décisif dans sa quête de souveraineté numérique. La formation des talents, le développement d’infrastructures adaptées et la mise en œuvre effective des lois sur la protection des données sont autant de défis à relever pour garantir un avenir numérique autonome et sécurisé sur le continent.